Ces poupées japonaises connaissent un succès inattendu en Europe et font l’objet de milliers de publications sur Instagram et TikTok. Les jeunes dévalisent les magasins qui en vendent.

Sonny AngelDes chérubins aux couvre-chefs à l’effigie de fruits ou d’animaux, l’air légèrement farceur, voire un peu inquiétant… Voilà quelques mois que ces petites figurines ont fait soudainement leur apparition sur les coques des smartphones des plus jeunes, ou sur les étagères de leurs chambres.

D’origine japonaise, les Sonny Angels sont vendus dans des pochettes surprises. Ils sont devenus l’accessoire à la mode du moment aux États-Unis et en Europe, alors même que leur création remonte à 2010.

Frédérique Dardenne, la gérante de la librairie jeunesse Am Stram Gram à Bruxelles, en sait quelque chose. Elle qui vendait les figurines en question dès 2011 avait progressivement arrêté faute de demande. Pourtant, en janvier dernier, voilà que des clientes dans la vingtaine franchissent les portes du magasin avec une seule idée en tête : « Savoir si j’ai des Sonny Angel», s’étonne-t-elle encore.

Une fois encore, les réseaux sociaux ont joué un rôle essentiel dans l’émergence de cette mode. « Les jeunes filles m’ont expliqué que des influenceuses qu’elles suivent déballent ces figurines en vidéo et que ça leur donne envie, à elles aussi, d’en acheter», explique la libraire.

Face à la déferlante de messages sur le compte Instagram de sa boutique, Frédérique Dardenne se décide à refaire ses stocks de figurines. « Mais les fournisseurs croulent sous les demandes et n’arrivent pas forcément à suivre», détaille la libraire. Sur le site de Baby Watch, l’un des fournisseurs européens, la plupart des collections sont en rupture de stock.

*De son côté, Frédérique Dardenne reçoit généralement 70 à 80 boîtes, qui s’écoulent souvent «en moins de quarante-huit heures», assure-t-elle.

Des déballages à succès

Sous ses yeux ébahis, ses jeunes clientes achètent parfois six à sept boîtes d’un coup, chacune à plus de dix euros. Ces dernières espèrent compléter leur collection de poupons, qui se déclinent en série à thèmes : ceux avec des chapeaux en forme de légumes, ou bien ceux grimés en chat par exemple. Il faut en compter douze pour réunir une série complète. « Il y a quelques semaines, un groupe dacheteuses les a ensuite déballées sur la petite terrasse face à la boutique, tout en se filmant», s’amuse Frédérique Dardenne.

Les vidéos de déballages sur Instagram et TikTok ont un public conséquent. Sur le seul réseau social chinois, le hashtag «Sonny Angel» cumule plus de 220 millions de vues, et 180 millions avec «Angels» au pluriel. Les influenceurs entretiennent la tendance et donnent rendez-vous à leurs abonnés, en direct, pour découvrir quelle figurine ils ont obtenue.

Certains n’hésitent pas à surjouer l’émotion, comme lorsque l’un d’entre eux se désole, les larmes aux yeux, d’avoir eu «le bébé le plus moche, avec son couvre-chef en forme de raisin». D’autres montrent à leurs abonnés la petite chambre qu’ils ont construit pour leur Sonny. La mannequin américaine Bella Hadid, quant à elle, expose fièrement, sur son compte Instagram, ses étagères croulant sous ces bébés de plastique.

Sur les smartphones ou les ordinateurs des adolescentes, il n’est pas rare également de voir apparaître la tête d’un poupon couvert d’un chapeau en forme d’ananas ou de fraise : après les figurines, la marque japonaise s’est mise à vendre cette année des «Hipper», des versions miniatures des Sonny qui s’accrochent aux écrans. « C’est encore plus recherché que les figurines originelles!», assure la libraire Frédérique Dardenne.

Communautés de passionnés

Derrière cet engouement, des communautés soudées se constituent. Amusé par le phénomène, un journaliste du New York Times s’est même rendu en avril dernier au Washington Square Park, où une réunion de 150 collectionneurs se tenait pour échanger les précieuses poupées.

Sur les photos de ce reportage insolite, les passionnés étalent fièrement, sur des couvertures disposées au sol, leur famille de poupons.

En France, des groupes d’adeptes existent également. Pour les trouver, il suffit de se rendre sur Facebook où fleurissent ces derniers temps des pages dédiées aux discussions et aux trocs de bébés en plastique, parfois suivies par plus de 1000 adeptes.